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C’est le groupe le plus acclamé, le plus prolifique et le plus vénérable du rap français, dont ils ont posé les fondations dès 1990 avec leur cassette Concept, le 1er album de rap français. Depuis ces temps héroïques, les Marseillais d’IAM n’ont jamais dévié de leur route, proposant un rap aux lyrics écrits avec méticulosité, posés sur des instrumentaux originaux, souvent inspirées de musiques ethniques grâce à leur concepteur sonore Imhotep. Seul mouvement majeur : le départ de Freeman peu après le concert devant les pyramides du Caire en 2008.  De retour avec Révolution, 8e album studio, IAM prouve qu’il a toujours sa place dans un monde rap dont les nouveaux héros ont trop souvent oublié le contenu des lyrics au profit de l’ambiance club. Pas de risques avec Chill, Jo et les autres : ici le texte est roi et le son un savant mélange entre tradition orthodoxe et éclats de modernité. Entretien avec des légendes, IAM.

RFI Musique : Après presque trente ans de carrière dans une musique où il est difficile de durer, est-ce qu’il vous arrive de douter ?
Akhenaton :
On a toujours le doute. Mais sur la longueur, c’est une force de se remettre en question. Quand on s’assoit sur un fauteuil qui ressemble trop à un trône, ça peut être problématique. Le doute nous fait évoluer artistiquement, travailler, améliorer ce qu’on trouve moins bien dans ce qu’on fait. Sur Révolution, je suis passé par des phases d’euphorie et des phases de déprime.
Kheops : Des phases de rire, aussi !

Il y a cinq invités sur Révolution. Sur Fiya, vous avez choisi de faire un featuring avec Lino d’Ärsenik…
Akh :
On a enregistré ensemble à Marseille.
Kheops : Sur un instrumental qui a été fait en Thaïlande.
Akh : Depuis le début, on voulait faire un feat. avec Lino. On l’a rencontré à Paris assez tôt, et il y a eu une réflexion. Selon Lino, la meilleure combinaison d’IAM, c’était celle avec Pit Baccardi sur son album. Donc on s’est dit qu’on allait faire le même genre de morceau, avec des lyrics très croisés, pas des couplets qui se succèdent. Lino a été obligé de l’écrire avec nous dans le même lieu. On a passé deux jours ensemble à bosser sur le titre. Très bon souvenir.
Shu : Sur l’album Révolution, on a également un feat. avec Nuttea. Lui aussi, c’est une longue tradition, il était sur La 25e Image, un titre de L’École du micro d’argent.
Akh : Et puis sur le dernier morceau Bien plus beau, on a Meryem Saci, une Canadienne qui peut chanter en anglais, en français et en arabe, et aussi rapper. Une super artiste.

Est-ce que vous vous tenez au courant de l’actualité du rap français ?
Akh : Nos enfants en écoutent. Certains du groupe, comme Kephren, en consomment pas mal. J’ai écouté beaucoup d’artistes de la nouvelle génération, mais passer du temps dessus… J’arrive déjà à peine à avoir assez de temps pour détailler ce qui se fait en rap US. Culturellement, je n’ai pas l’habitude d’écouter du rap français. Je suis un pauvre connaisseur, je l’avoue. Et ce n’est pas par snobisme, c’est une question d’habitude. À 12 ans, j’écoutais du rap américain et je m’y suis habitué.
Shu : Pareil que Chill, mon fils est plus calé en rap français que moi. Mais il y a des albums pour lesquels on a plus de sensibilité, comme le Cyborg de Nekfeu ou les projets de Youssoupha, Kery James et Médine. C’est plus proche d’un rap qu’on aime écouter et qu’on aime faire, aussi.

Vous n’êtes pas vraiment sur la tendance du rap marseillais du moment, donc…
Shu : Du tout. Mais ça ne devrait même pas t’étonner…
Kheops : C’est une génération différente, ça n’est pas notre musique. Moi, avant qu’il y ait cette nouvelle génération marseillaise, j’écoutais déjà du rap US à 110%. Comme disait Chill, le temps manque pour tout écouter.
Akh : Par contre, on fait des collabs avec le rap français : Shu avec Demi-Portion, moi avec Lomepal et Deen Burbigo, des gens avec lesquels on partage une certaine orthodoxie. C’est une question de plume : les gens avec lesquels on pose, soit on a des affinités avec eux, soit ils sont très différents de nous, mais on les trouve talentueux dans leur domaine. Il y en a dans la nouvelle génération. C’est pour ça que dans IAM, on refuse de dire que „c’était mieux avant”.
Shu : Les nouveaux rappeurs, ça n’a pas à nous déranger ou pas, c’est juste une évolution. On a un tronc commun, nous on y est resté un peu collés, les ramifications sont diverses, plus pop. Et puis, c’est normal que la variété d’aujourd’hui soit teintée de notre musique. C’est une évolution, on n’est pas obligé de l’écouter si on ne l’aime pas, mais ça reste du rap.

Le premier single est Monnaie de singe
Akh : On l’a écrit en Thaïlande, on l’a bouclé pendant la session d’enregistrement.
Shu : La prod est de Chill, c’est un pont entre le rap un peu orthodoxe qu’on fait et une certaine modernité dans les sons. Le rap a évolué, certains aspects de cette évolution nous intéressent. Donc, on les récupère pour les intégrer à notre rap qui colle à ces fameux fondamentaux de la culture hip hop. On a écrit pas mal de morceaux en réaction à diverses choses, et celui-là est un clin d’œil à certaines phrases désobligeantes.

Révolution, c’est un album conçu pour durer ?
Akh :
C’est vrai qu’avec Arts martiens, on a réussi à tenir deux ans, on a fait 250 concerts, c’est énorme. L’objectif est de faire pareil, voire mieux, et sortir le plus de clips possible. Avec IAM, on continue à vendre beaucoup de supports physiques, et notamment du vinyle.

IAM Révolution (Def Jam France/Universal Music) 2017

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